mardi 7 avril 2009

Le Grand Macabre, l'opéra de toutes les audaces


Après sa création belge au Vlaamse Opera, l'œuvre de Ligeti arrive enfin à la Monnaie où Peter de Caluwe a demandé aux maîtres catalans du visuel de la Fura dels Baus de mettre en images cette sulfureuse fable onirique. Entretien.


« Le Grand Macabre », pour vous, n'est-ce pas le sujet rêvé ?

C'est un sujet qui nous a tout de suite emballés. Il y a une rupture de logique avec le théâtre traditionnel, même si Ligeti a conservé l'essentiel de la pièce et des personnages de Ghelderode. C'est le théâtre et la musique qui se moquent d'eux-mêmes dans une gigantesque autodérision. On imagine mal à l'opéra qu'un mec bourré se mette à chanter des coloratures dignes de Lucia di Lammermoor ! De même il y a un peu de Don Quichotte dans Nekrotzar et on n'arrête pas de répéter à Chris Merritt qui chante Piet the Pot : « Pense à Sancho Pança ! »

Quelle est votre perception de ce scénario de fin du monde ?

L'opéra ne nous parle pas de la fin du monde, mais de la peur de la fin du monde. La peur est un sentiment très physique, presque animal. Et c'est elle que nous voulons rendre dans son côté « physique ». Le décor représente un grand corps qui a peur de mourir et c'est lui qui incarnera Breughelland.

Comment rapprochez-vous ce grand corps de votre principe de réalité ?

Il s'agit d'un corps très précis, celui de Claudia, une de nos amies comédienne. Au début, on la voit attablée, occupé à manger un MicMac(abre). Elle a peur, se penche, ouvre la bouche et on rentre dans le rêve. Son corps immense (debout, elle mesurerait 16 mètres !) devient le paysage de Breughelland.

Tout le travail est très organique. Les amants cachés apparaîtront dans un de ses yeux, le balcon des ministres sera dans les vertèbres et Go-Go, le glouton, habitera les intestins. Ce corps s'ouvre et se fragmente, avec des côtés presque surréalistes.

En fait, Breughelland se réfère directement à Jérôme Bosch.

Mais l'angoisse ne finit-elle pas par disparaître.

Oui, Parce que, finalement chez Ligeti, on a l'impression que la mort a été trompée et elle s'efface. On a pu survivre à la mort. Et on doit donc jouir de la vie.

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