lundi 14 mai 2012














                     Sean Young, Blade Runner

vendredi 11 mai 2012

Little Armenia




Madlene Djeredjian, from "The Last of Beirut", single channel projection, 2006



Ara Madzounian, Gypsy street entertainers (2009)



Garine Torossian, I come from Bourj Hammoud, film still (2012)






(http://www.seismopolite.com/lebanon-in-the-armenian-imaginary-so-close-with-a-
distance)



MILLE PLATEAUX, LA PENSÉE DU PAYSAGE À VASSIVIÈRE







Il faut arriver à Vassivière la nuit, aborder son lac, gagner son île par un chemin étroit et découvrir enfin l’édifice onirique et massif du phare bordé d’une constellation d’étoiles scintillantes. La bâtisse est un centre d’art et les étoiles sont une installation de l’artiste Erik Samakh. Nous sommes dans la campagne la plus rurale du Limousin, à deux pas du plateau dit « de Millevaches ».







En 1980, Gilles Deleuze et Félix Guattari réunissent un ensemble de textes dans leur ouvrage communMille Plateaux, second tome du cycle Capitalisme et Schizophrénie succédant à L’Anti-ŒdipeMille Plateaux explore dans un langage simple la pensée des rhizomes. L’écriture adopte elle-même une forme  « rhizomatique » dans laquelle la lecture se perd à dessein. L’ouvrage préfigurait par exemple les cultures électroniques – dans la musique et dans les arts – et l’organisation du réseau internet en tant que toile. Il y est question de rhizomes et de racines évidemment mais également de linguistique, d’un corps sans organes, de « nomadologie », du « devenir-animal » deleuzien, de loups et de plateaux. « Jamais un plateau n’est séparable des vaches qui le peuplent, et qui sont aussi les nuages du ciel » y lit-on.
L’inspiration du titre – et pourquoi pas de l’ouvrage tout entier – de Mille Plateaux est à relier à la campagne de Vassivière en Limousin et son Plateau de Millevaches. Les racines rurales de Deleuze.

Rosa Barba, White museum, 2010
Vue de l’exposition Est-ce que c’est une analogie à deux dimensions ou une métaphore ?, 2010. Courtesy de l’artiste – Ciap Ile de Vassivière / Photographe : François Doury

On vient se perdre là physiquement comme dans la lecture de l’ouvrage mais un phare guidera le voyageur. En contrebas du bien nommé plateau gît un bâtiment-phare au centre d’une île à la manière d’un bateau-phare en mer. Conçu par les architectes Aldo Rossi et Xavier Fabre, l’édifice accueille le Centre International d’Art et du Paysage de Vassivière, un lieu d’art unique par sa situation géographique. Une partie des œuvres montrées ici semblent nomades, déracinées. L’autre partie semble pouvoir n’exister qu’ici. Comme si cet environnement insulaire dominé par un plateau peuplé de mille silhouettes bovines était le lieu idéal pour l’art d’aujourd’hui et celui de demain, celui des artistes dont les matériaux des œuvres sont les éléments naturels. Ces sont par exemple les pièces d’Erik Samakh qui pour Les rêves du Tujica plantera des arbres qui prendront racines pour peupler l’île. Pour son installation Les Joueurs de flûte le soleil et les arbres se font musiciens grâce à des flûtes solaires disposées ci et là.


Ce sont pourtant les hommes qui ont créé le lac et son île. Ils sont en réalité nés de l’activité humaine. Le fait s’est imposé intelligemment comme un parti pris et le centre d’art en est le témoin. L’île bénéficie ainsi d’une charte paysagère établie par Gilles Clément. Elle s’est également vue peuplée d’un parc de sculptures semées par des artistes aussi divers qu’Ilya Kabakov, Olivier Mosset ou Michelangelo Pistoletto. Ici l’art invite à contempler le paysage jusqu’à l’horizon et au delà. Il lui rend hommage. Le paysage devient matière à penser, comme Jean-Jacques Rousseau et Jean La Fontaine arpentant la forêt, comme Gustav Mahler composant isolé dans son chalet isolé au milieu des bois ou comme Paul Cézanne face à la montage Saint Victoire.
Henri Maldiney, philosophe contemporain français, écrivait « Ainsi le peintre est un homme qui n’est pas devant les choses mais qui communique en elles avec une réalité. » C’est l’expérience de cette réalité du paysage qu’offre le plateau de « Millevaches ».

C’est la raison pour laquelle il faut se perdre à Vassivière à dessein comme dans l’ouvrage du philosophe. L’appréhender comme une expérience et s’y perdre la nuit comme une « racine aveugle » pour le plaisir de trouver, peu par hasard, le phare de l’île.
Au moment où j’écris ces lignes Marianne Lanavère entre en poste au Centre International d’Art et du Paysage de Vassivière. Elle travaille déjà sur le projet inaugural de la nouvelle direction, une grande exposition qui ouvrira ses portes le 7 juillet prochain dans laquelle seront réunis des artistes qui ont marqué l’histoire du lieu ainsi qu’un choix parmi les forces de la création contemporaine en Limousin.

Il existait avant même l’ouverture du centre d’art un symposium pour la sculpture et Marianne Lanavère entend accorder à ce média une place de choix dans sa programmation. Comme le paysage, la sculpture est un média d’appréhension du monde physique idéal. Les projets à venir exploreront notre perception du paysage et du monde.
A quelques pas du centre d’art, verra également le jour un programme de résidence permanent. L’esprit du lieu n’a pas fini d’agir…
Jérôme Lefèvre

(source: http://www.dust-distiller.com/art/mille-plateaux-la-pensee-du-paysage-a-vassiviere/)

vendredi 4 mai 2012